سجلماسة

( Sijilmassa )

Sijilmassa (en arabe : سجلماسة ; en berbère : ⵙⵉⵊⵉⵍⵎⴰⵙⴰ) était une importante ville fondée en l'an 757 (140 de l'Hégire) au Maroc, qui joua dès le VIIIe siècle un rôle important dans le commerce transsaharien, et ce pendant tout le Moyen Âge. Elle se trouvait à proximité immédiate de l'emplacement actuel de la ville de Rissani, au sud d'Errachidia, à 40 km au nord des célèbres dunes de Merzouga, dans la région de Tafilalet. Actuellement[Quand ?], seules quelques ruines modestes subsistent de la cité.

 Routes

En 757-758, la tribu zénète des Meknassas de rite kharidjite sufrite fonde Sijilmassa sous l'autorité de Semgou Ibn Wassoul al Miknassi[1], peu après la grande révolte berbère de 739-743 dirigée contre les gouverneurs arabes du Maghreb qui dépendaient du califat omeyyade de Damas. La ville devient la capitale d'un émirat kharijite, sous la férule des Midrarides. Les Midrarides (appelés aussi Wassoulites) adoptent longtemps le rite le plus modéré du kharidjisme, le sofrisme. Ils mènent une politique d'alliance stratégique avec l'autre grande puissance kharijite du Maghreb, l’Imamat rostémide de Tiaret. Mais au début du Xe siècle, on note un assouplissement dans la pratique du sofrisme et l'émir midraride Muhammad Ibn Maymun va jusqu'à reconnaître l'autorité spirituelle du calife sunnite abbasside de Bagdad. Cela vient du fait que Sijilmassa est devenue une place de commerce de niveau international, et cultive ainsi une certaine forme de cosmopolitisme, attirant même le fondateur de la dynastie fatimide, le chef chiite ismaélien ‘Ubayd Allâh al-Mahdî qui fuyait les persécutions abbassides au Moyen-Orient. Emprisonné sur décision de l'émir midraride, Ubayd Allah est libéré en 909 par les Kutamas à la tête d'une grande armée du Maghreb central, avant qu'il ne proclame le califat fatimide.

Elle est ensuite l'objet de conflits entre les Zirides et des Maghraouides inféodés aux Omeyyades de Cordoue, du fait de sa situation au débouché des pistes caravanières. La ville est ainsi occupée sous le règne d'Al-Hakam II, qui y établit des ateliers monétaires produisant les dinars d'or du califat ibérique.

 Principales routes caravanières du commerce transsaharien vers 1400.

En effet, Sijilmassa est devenu une cité marchande sur la rive nord du Sahara où faisaient halte les grandes caravanes amenant du Bilad al-Soudan, correspondant aux pays inclus entre le Sénégal et le Soudan actuels) et notamment de l'Empire du Ghana, de la poudre d'or, de l'ivoire, des plumes d'autruche, et des esclaves[2],[3]. Elle constituait en outre un centre important des Berbères zénètes. La cité est finalement conquise par les Almoravides vers 1055.

Vers 1230, Jacques Ier de la couronne d'Aragon invite les Juifs de Sijilmassa à s’installer sur l'île de Majorque et en Catalogne, afin d'établir un axe commerçant allant de Barcelone à Sijilmassa, « par lequel passait une bonne partie du ravitaillement en or de la péninsule Ibérique », ajoutant ainsi une population arabophone du sud maghrébin à la communauté juive majorquine. Plusieurs siècles plus tard, les descendants de ces commerçants continuaient à émailler les documents de négoce de dialecte arabe (aljamiada)[4]

La situation commerciale de la cité continue d'être florissante jusqu'au XIVe siècle, et son ouverture sur l'ensemble du monde connu est attestée par le voyageur Ibn Battûta qui affirme avoir rencontré des Sijilmassiens au cours de son périple dans la Chine mongole des Yuan.

Dans le dernier tome de son récit al-Rihla ou Les Voyages, l'explorateur berbère Ibn Battûta décrit son voyage vers le Soudan (le Mali actuel) en 1352 dont une des premières étapes est la cité de Sijilmassa qu'il décrit ainsi :

« Or j’arrivai à la ville de Sidjilmâçah, une des cités les plus jolies. On y trouve des dattes en grande quantité et fort bonnes. La ville de Basrah lui ressemble sous le rapport de l’abondance des dattes ; mais celles de Segelmessa sont meilleures. Elle en fournit surtout une espèce appelée îrâr, qui n’a pas sa pareille dans tout l’univers. Je logeai, à Segelmessa, chez le jurisconsulte Aboû Mohammed Albochry, dont j’avais vu le frère dans la ville de Kandjenfoû, en Chine. Que ces deux frères étaient éloignés l’un de l’autre ! Mon hôte me traita de la manière la plus distinguée. J’achetai, dans Segelmessa, des chameaux, auxquels je donnai du fourrage pendant quatre mois. Au commencement du mois divin de moharram de l’année 753 de l’hégire, je me mis en route avec une compagnie ou caravane dont le chef était Aboû Mohammed Yandécân Almessoûfy (que Dieu ait pitié de lui !). Elle renfermait beaucoup de marchands de Segelmessa et d’autres pays. »[5]

Du temps de sa splendeur, Sijilmassa est composée d'environ 600 kasbahs qui forment autant de quartiers. La kasbah principale abrite le palais de l'émir, la grande mosquée, un atelier de frappe monétaire ainsi qu'un immense marché de négociants, dont certains viennent d'aussi loin que l'Égypte ou l'Irak.

 Route dans la vallée entre Sijilmasa and Alnif

Sijilmassa perd de son importance au cours des siècles et ne cesse de décliner à partir du XVe siècle[6], notamment en raison de la baisse du commerce transsaharien du fait du développement des voies maritimes entre l'Afrique et l'Europe par les Portugais et d'autres routes terrestres vers le Touat ainsi que le rôle croissant de Marrakech.

La ville est la base de départ des ancêtres de la dynastie alaouite pour conquérir le Maroc au XVIIe siècle.

Elle est finalement rasée en 1818 par les tribus de la confédération Aït Atta sous le règne du sultan alaouite Moulay Slimane[7].

[1] Michael Dumper et Bruce E. Stanley, Cities of the Middle East and North Africa: a historical encyclopedia, ABC-CLIO, 2007, (ISBN 978-1-57607-919-5), p. 334 Anthony Ham et Alison Bing, Morocco, Lonely Planet Guides, 2007, (ISBN 978-1-74059-974-0), p. 361 Ingrid Houssaye Michienzi et Judith Olszowy-Schlanger, « Échanges marchands et pratiques langagières : la communication entre chrétiens, juifs et convertis à Majorque vers 1400 » [PDF], sur docplayer.fr, Écrits, langages et cultures du commerce, CEHTL, 10, Paris, Lamop, 2018 (1ère éd. en ligne 2019) (consulté le 24 décembre 2020) Ibn Battûta (trad. C. Defremery et de B.R. Sanguinetti (1853-1858)), Voyages, Paris, La Découverte, janvier 1997, 462 p. (ISBN 2-7071-2679-9, lire en ligne) François-Xavier Fauvelle (dir.), L'Afrique ancienne : de l'Acacus au Zimbabwe, Paris, Belin, belin, 2018 p. (ISBN 978-2-7011-9836-1), p. 121 Hsain Ilahiane, Ethnicities, Community Making, and Agrarian Change, University Press of America, 2004, (ISBN 0-7618-2876-1), page 53
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