Sarajevo

Sarajevo (/sa.ʁa.je.vo/ ; en bosnien cyrillique : Сарајево, /Lire la suite

Sarajevo (/sa.ʁa.je.vo/ ; en bosnien cyrillique : Сарајево, /sǎrajeʋo/ ; anciennement Bosna-Seraï ; en turc : Saraybosna) est la capitale et la plus grande ville de Bosnie-Herzégovine. Traversée par la rivière Miljacka, la ville fait partie du canton de Sarajevo, l'un des dix de Bosnie-Herzégovine.

Sarajevo est le centre politique, financier, social et culturel de la Bosnie-Herzégovine avec une influence régionale dans le divertissement, les médias, la mode et les arts.

En raison de sa longue histoire de diversité religieuse et culturelle, Sarajevo est parfois appelée la « Jérusalem de l'Europe » car les quatre grandes religions vivent ensemble, en harmonie, dans un rayon de 150 m.

C'est l'une des seules grandes villes européennes à avoir une église catholique, une église orthodoxe, une synagogue et une mosquée dans le même quartier.

La ville est considérée comme l'une des plus importantes villes des Balkans et son histoire est particulièrement riche depuis sa création par les Ottomans en 1461. La ville a été le théâtre de l'assassinat par Gavrilo Princip de l'archiduc François-Ferdinand d'Autriche, qui marqua le début de la Première Guerre mondiale.

Plus récemment, elle accueillit les Jeux olympiques d'hiver de 1984 et fut assiégée durant la guerre de Bosnie-Herzégovine dans les années 1990 : entre 1992 et 1996, elle a subi un siège de plus de mille jours qui a fait plus de 11 000 morts. Dans la ville, la guerre a laissé de nombreuses traces visibles sur toutes les façades d'immeuble qui portent des traces d'impacts et de réparations de fortune. Les marques des obus dans les chaussées sont quant à elles précieusement conservées. Le siège reste lui aussi omniprésent dans les conversations.

Avant la guerre, le dernier recensement de 1991 avait évalué la population à 429 672 habitants. En 2013, selon le site officiel de Sarajevo, la population de la ville proprement dite est estimée à 405 930 habitants.

Sarajevo a subi une reconstruction après la guerre et est la ville à la croissance la plus rapide de Bosnie-Herzégovine.

En 2006, la série de guides de voyage Lonely Planet considérait Sarajevo comme la 43e meilleure ville du monde et, en décembre 2009, Sarajevo figurait parmi les dix premières villes à visiter en 2010.

En octobre 2019, Sarajevo a été désignée ville créative de l'UNESCO pour sa capacité à placer la culture au centre de ses stratégies de développement et est l'une des dix-huit villes du cinéma au monde.

La ville est très polluée pendant l'hiver. La pollution de l'air est à l'origine de près d’un décès sur cinq.

Préhistoire et Antiquité  Vase de la culture de Butmir.

La région de Sarajevo, particulièrement riche en silex, est habitée depuis le Néolithique. En 1893, lors de la construction de la Faculté d'agriculture de l'Université de Sarajevo, les vestiges d'un village ont été découverts à Butmir, dans l'actuel faubourg d'Ilidža. En raison de l'originalité des céramiques et des poteries mises au jour, présentant des motifs en spirale et des figures humaines et animales, les archéologues ont donné à cette culture le nom de culture de Butmir[1]. Des vestiges remontant à l'âge du bronze ont également été découverts à Zlatište et à Debelo Brdo.

Debelo Brdo atteste aussi de la présence des Illyriens dans la région à l'époque historique[1], ainsi que d'autres sites de la région situés près de la rivière Miljacka et dans la vallée de Sarajevo. Ces Illyriens appartenaient à la tribu des Daesitiates, qui résista à la conquête romaine jusqu'au moment où le futur empereur Tibère les défit en 9 avant Jésus-Christ. Une colonie romaine du nom de Aquae Sulphurae exista à l'emplacement de l'actuelle Ilidža ; ainsi nommée à cause de ses eaux sulfureuses[1], elle fut la seule localité importante du secteur à l'époque romaine et ses ruines font aujourd'hui l'objet d'une protection officielle[2].

Moyen Âge  Stećak devant le Musée national de Bosnie-Herzégovine.

Les Slaves s'installèrent en Bosnie au VIIe siècle. Une localité du nom de Kratera, située dans la région de Sarajevo et de Kotorac, est citée dans le De administrando Imperio, un ouvrage de l'historien et empereur byzantin Constantin VII, mais son emplacement n'est pas établi avec certitude[réf. nécessaire]. Selon un document signé par le roi Béla IV de Hongrie le 20 avril 1244, la région de Sarajevo faisait partie de la župa de Vrhbosna, district dans lequel se trouvait la cathédrale Saint-Pierre, construite en 1239 et qui constituait le siège d'un diocèse catholique ; cette église se trouvait probablement près de l'emplacement de l'actuelle mosquée de Brdo[1]. Une localité du nom de Vrhbosna fut fondée vers 1270 mais elle n'est attestée dans des documents qu'en 1379 ; elle se trouvait sans doute à l'emplacement de l'actuelle Bijela tabija, la « Forteresse blanche »[1]. De ce passé médiéval témoignent encore de nombreuses tombes monumentales appelées stećci (au singulier : stećak), dont celles du village de Hreša, aujourd'hui conservées au Musée national de Bosnie-Herzégovine[3].

Période ottomane  La Careva džamija.

Les Ottomans s'emparèrent de la forteresse de Vrhbosna en 1429. L'année communément admise pour la création de la ville est 1461, quand le premier gouverneur ottoman de Bosnie, Isa-beg Išaković, choisit le petit village de Brodac pour en faire le point de départ d'une nouvelle ville. Il y fit construire une mosquée, un marché couvert (bezistan), un bain public (hammam), un pont, une auberge et le palais du gouverneur, Saray, qui donna son nom actuel à la ville. La mosquée, construite en 1462, fut appelée Careva džamija, la « Mosquée de l'empereur », en l'honneur du sultan Mehmed II le Conquérant[4]. La ville se développa et devint l'une des plus importantes de la région, avec une colonie de marchands de Raguse. De nombreux chrétiens catholiques se convertirent à l'islam, mais la ville accueillit également pour la première fois une importante communauté orthodoxe qui y édifia une église. Au début du XVIe siècle, des Juifs séfarades fuyant l'Andalousie vinrent s'y installer, apportant avec eux une Haggadah rédigée au XIVe siècle et connue sous le nom de Haggadah de Sarajevo[5]. Sarajevo devint la ville de quatre religions, ce qui lui valut le surnom de Jérusalem européenne ou de Jérusalem des Balkans[6].

 Le turbe de Gazi Husrev-beg (à droite), avec celui de Murat-beg Tardić (à gauche). Mosquée GaziHusrev-beg

Au XVIe siècle, la ville connut un important développement, notamment sous l'impulsion de donateurs comme Gazi Husrev-beg qui y fit construire l'essentiel de la vieille ville actuelle, connue sous le nom de Baščaršija, ainsi qu'une Sahat-kula, une « tour de l'horloge », construction typique des Balkans ottomans, et tout un complexe comprenant une mosquée (Gazi Husrev-begova džamija), une médersa (école coranique), une bibliothèque et une école de derviches[7],[8]. De son vivant, Gazi Husrev-beg fit construire son propre turbe (tombeau), ainsi qu'un autre plus petit, à côté du sien, pour Murat-beg Tardić, un prisonnier de guerre qu'il libéra parce qu'il avait embrassé l'islam[7]. Sarajevo posséda également son propre système d'alimentation en eau. Grâce à ses fontaines et ses écoles, la ville eut la réputation d'être l'une des plus évoluées d'Europe[réf. nécessaire]. Pendant tout le XVIIe siècle, Sarajevo resta une ville prospère et, en 1660, sa population était estimée à plus de 80 000 habitants, ce qui en faisait la seconde ville de l'Empire ottoman après Constantinople[réf. nécessaire].

La fin du XVIIe siècle constitua une période difficile pour l'Empire ottoman, notamment après sa défaite lors de la bataille de Vienne en 1683. En 1697, après la défaite de la bataille de Zenta, dans une attaque conduite contre l'Empire par le prince Eugène de Savoie, Sarajevo fut brûlée. La ville fut reconstruite en partie par la suite, mais la capitale de la Bosnie fut transférée à Travnik. Jamais la ville ne retrouva sa puissance d'autrefois, même si le XVIIIe siècle reste marqué par une importante vie intellectuelle, avec des écrivains comme Mehmed Mejlija Guranij et Mula Mustafa Bašeskija. Des bibliothèques, des écoles et mosquées furent construites, mais aussi de nouvelles fortifications. En 1785, une épidémie de peste éclata à Sarajevo et, en 1788, un incendie ravagea la ville.

Au début du XIXe siècle, avec l'autonomie de la Serbie vis-à-vis de la Sublime Porte, des mouvements nationalistes se développèrent en Bosnie, ce qui conduisit à la révolte de Husein Gradaščević définitivement matée par les Ottomans dans la plaine de Sarajevo en 1832.

Période austro-hongroise  Timbre de Bosnie-Herzégovine, oblitéré à SARAJEVO XXXII en 1884. Une rue de Sarajevo vers 1900. L'assassinat des autrichiens par un militant serbe vu par la presse française (12 juillet 1914).

Après la défaite de l'Empire ottoman dans la guerre russo-turque de 1877-1878 et à la suite du congrès de Berlin, la Bosnie et l'Herzégovine sont placées sous le contrôle de la monarchie austro-hongroise, ces régions restant officiellement intégrées à l'Empire ottoman ; cette décision provoque la formation d'un gouvernement provisoire à Sarajevo et de nombreux mouvements de résistance[9]. Mais, dès la fin d'octobre 1878, les Autrichiens se rendent maîtres de la Bosnie et son territoire est réorganisé. Cette période est marquée par d'importants changements dans la ville qui s'industrialise et s'occidentalise. Un bureau de poste militaire avec station télégraphique est ouvert, identifié par les chiffres romains XXXII[10].

Sur le plan architectural, de nombreux bâtiments publics changent le visage de la ville, comme le bâtiment du gouvernement de Bosnie, construit en 1884 et 1885 sur des plans de l'architecte Josip Vancaš, l'hôtel de ville, construit par Alexander Wittek à partir de 1892, le théâtre national, conçu par Karel Pařík en 1897-1899, la poste centrale, construite par l'architecte Josip Vancaš entre 1907 et 1909 ou les bâtiments actuels du musée national, conçus par Karel Pařík et inaugurés en 1912[1]. Parmi les édifices religieux s'élève la cathédrale du Cœur-de-Jésus, siège de l'archidiocèse de Vrhbosna, construite entre 1884 et 1889 par l'architecte Josip Vancaš[11]. En 1910, Sarajevo compte un peu moins de 52 000 habitants[réf. nécessaire].

Le 28 juin 1914, le double assassinat à Sarajevo de l’archiduc François-Ferdinand, héritier du trône d’Autriche-Hongrie, et de son épouse Sophie Chotek, duchesse de Hohenberg, par Gavrilo Princip, devient l’événement déclencheur de la Première Guerre mondiale. Les organisateurs de l’attentat sont de jeunes nationalistes « yougoslaves », des Serbes de Bosnie et des Musulmans bosniaques[12], qui effectuent leurs études à Belgrade[13].

De la Yougoslavie à l'indépendance de la Bosnie-Herzégovine  Feu éternel, Sarajevo

Après la Première Guerre mondiale et la défaite de l'Autriche-Hongrie, à partir d'octobre 1918, Sarajevo, comme le reste des territoires slaves anciennement contrôlés par la double monarchie, fait partie de l'éphémère État des Slovènes, Croates et Serbes, puis, à partir du 1er décembre, du royaume des Serbes, Croates et Slovènes, gouverné par la dynastie serbe des Karađorđević, avec comme capitale Belgrade[14]. Le 3 octobre 1929, le royaume prend le nom de Yougoslavie et de nouvelles divisions administratives sont mises en place[15]. Sarajevo devient le centre administratif de la banovine de la Drina nouvellement créée. Pendant la Seconde Guerre mondiale, en 1941, les puissances de l'Axe occupent la banovine qui est supprimée et son territoire partagé entre l'État indépendant de Croatie, dont la ville de Sarajevo, et la Serbie occupée par les troupes allemandes.

Après la Seconde Guerre mondiale, Sarajevo devient la capitale d'une République populaire puis, en 1963, socialiste de Bosnie-Herzégovine, au sein de la République fédérale populaire, puis, en 1963, socialiste de Yougoslavie. Elle retrouve rapidement de l'importance et devient un important centre industriel. Des quartiers modernes sont construits à l'est de la vieille ville. Sarajevo atteint sa taille maximale au début des années 1980, notamment lors des Jeux olympiques d'hiver de 1984.

En 1990, la ville devient le centre du nouveau pouvoir issu des premières élections libres marquant la fin du régime communiste. Le 6 avril 1992, Sarajevo est encerclée par les forces serbes. Le siège de la ville dure jusqu'en octobre 1995, période durant laquelle elle subit de nombreuses destructions et une importante baisse de sa population. Pendant toute la guerre, l'avenue centrale de la ville est jalonnée de tireurs embusqués, visant quiconque tente de la traverser pour rallier l'autre côté de la ville. Les accords de Dayton, signés en décembre 1995, mettent fin au conflit et au siège et permettent le rétablissement de l'électricité et du gaz.

La reconstruction de Sarajevo débute dès la fin de la guerre et en 2003, la majeure partie de la ville a été reconstruite : il reste seulement quelques ruines visibles dans le centre-ville et des traces d'impacts de balles dans les banlieues pauvres. Des immeubles modernes ont depuis été construits à travers toute la ville.


↑ a b c d e et f (en) « The culture and history », sur www.sarajevo-tourism.com (version du 17 mars 2004 sur Internet Archive). (en) « Roman remains at Ilidža, the archaeological site », sur aneks8komisija.com.ba, Site de la Commission de préservation des monuments nationaux de Bosnie-Herzégovine, 2003 (consulté le 15 novembre 2023). (bs) « Odsijek za srjedni vijek », sur zemaljskimuzej.ba, Site officiel du Musée national de Bosnie-Herzégovine (consulté le 11 avril 2009). (bs) « Careva džamija » (consulté le 12 avril 2009). « La Haggadah, ou comment raconter la sortie d'Égypte », sur col.fr, La voix de la communauté juive de France (consulté le 12 avril 2009). « DISCOURS DU SAINT-PÈRE JEAN-PAUL II À L'OCCASION DE LA PRÉSENTATION DES VŒUX DU CORPS DIPLOMATIQUE ACCRÉDITÉ PRÈS LE SAINT-SIÈGE », sur w2.vatican.va - Site officiel du Saint-Siège, 13 janvier 1996. ↑ a et b (en) « Ghazi Husrev-beg waqf », sur vakuf-gazi.ba, Gazi Husrev-begov vakuf u Sarajevu (consulté le 12 avril 2009). (en) « Gazi Husrev Bey Complex »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?), sur archnet.org, ArchNet (consulté le 12 mars 2009). Dušan T. Bataković, Histoire du peuple serbe, p. 209. Österreich 1850-1918, Spezialkatalog und Handbuch, von Dr. Ulrich FERCHENBAUER, Wien 1981 (en allemand), carte BOSNIEN-HERZEGOWINA page 565. (bs)(hr) « Katedrala Srca Isusova u Sarajevu », sur ktabkbih.net, Katolička Tiskovna Agencija (consulté le 12 avril 2009). Catherine Lutard, Géopolitique de la Serbie Monténégro, éditions Complexe (ISBN 2-87027-647-8) page 36. Academic American Encyclopedia, 1980, (ISBN 0-933880-00-6), page 286. Batković, op. cit., p. 276 à 278. Batković, op. cit., p. 294 et 295.
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