Contexte de Éthiopie

L'Éthiopie, en forme longue la république démocratique fédérale d'Éthiopie (en amharique : ኢትዮጵያ, Ītyōṗṗyā et የኢትዮጵያ ፌዴራላዊ ዲሞክራሲያዊ ሪፐብሊክ ye-Ītyōṗṗyā Fēdēralāwī Dīmōkrāsīyāwī Rīpeblīk ) est un État de la Corne de l'Afrique. L'Éthiopie a des frontières communes avec l'Érythrée (ancienne province) au nord, la Somalie à l'est-sud-est, le Soudan au nord-ouest, le Soudan du Sud à l'ouest-sud-ouest, le Kenya au sud et la république de Djibouti au nord-est. Depuis l'indépendance de l'Érythrée en 1993, l'Éthiopie n'a plus d'accès à la mer.

Deuxième pays d'Afrique par sa population, derrière le Nigeria, avec 110 871 031 habitants, l'Éthiopie est le dixième pays du c...Lire la suite

L'Éthiopie, en forme longue la république démocratique fédérale d'Éthiopie (en amharique : ኢትዮጵያ, Ītyōṗṗyā et የኢትዮጵያ ፌዴራላዊ ዲሞክራሲያዊ ሪፐብሊክ ye-Ītyōṗṗyā Fēdēralāwī Dīmōkrāsīyāwī Rīpeblīk ) est un État de la Corne de l'Afrique. L'Éthiopie a des frontières communes avec l'Érythrée (ancienne province) au nord, la Somalie à l'est-sud-est, le Soudan au nord-ouest, le Soudan du Sud à l'ouest-sud-ouest, le Kenya au sud et la république de Djibouti au nord-est. Depuis l'indépendance de l'Érythrée en 1993, l'Éthiopie n'a plus d'accès à la mer.

Deuxième pays d'Afrique par sa population, derrière le Nigeria, avec 110 871 031 habitants, l'Éthiopie est le dixième pays du continent par sa superficie (1 127 127 km2). Essentiellement constitué de hauts plateaux, s'étendant de la dépression de Danakil à −120 m jusqu'aux sommets enneigés du mont Ras Dashan à 4 543 m, le pays possède un environnement très diversifié traversé par six zones climatiques. La capitale, Addis-Abeba, située à 2 400 m d'altitude, est la quatrième capitale la plus élevée au monde et la première en Afrique.

Considérée comme l'un des berceaux de l'humanité, l'Éthiopie est, avec le Tchad, le Maroc et le Kenya, l'un des pays où l'on retrouve les plus anciens hominidés. On y a découvert Lucy en 1974 et, en 2003, les plus anciens spécimens d'Homo sapiens. Au sein de l'Afrique, l'Éthiopie se caractérise comme l'un des pays à avoir conservé sa souveraineté lors du partage de l'Afrique au XIXe siècle : de ce fait, ses couleurs symbolisent souvent l’Afrique et ont été adoptées par plusieurs autres États africains, dans des configurations différentes.

L'Éthiopie, aujourd'hui constitutionnellement laïque, est un pays où de nombreuses croyances coexistent. Après l'Arménie, c'est la deuxième plus ancienne nation chrétienne au monde, le christianisme s'y étant implanté vers l'an 330. S'y trouvent aujourd'hui des orthodoxes orientaux, des catholiques et des protestants. Par ailleurs, un tiers de ses habitants est musulman et des minorités religieuses comme les Beta Israel juifs ou des animistes y vivent aussi.

Sur le plan international, l'Éthiopie est signataire de la déclaration des Nations unies dès 1942 et devient l'un des 51 États membres fondateurs de l'ONU. Addis-Abeba est aujourd'hui le siège de la Commission économique pour l'Afrique (CEA) et de l'Union africaine.

Plus à propos Éthiopie

Informations de base
  • Devise Birr
  • Indicatif d'appel +251
  • Domaine Internet .et
  • Mains voltage 220V/50Hz
  • Democracy index 3.38
Population, Area & Driving side
  • Population 120283026
  • Zone 1104300
  • Côté conduite right
Historique
  • On identifie des États indépendants sur des parties du territoire actuel de l'Éthiopie depuis près de 3 000 ans. Vers le VIIIe siècle av. J.-C., on constate la formation du royaume D'mt, suivi de diverses autres entités, sans que les continuités soient toujours claires : le royaume d'Aksoum, les royaumes zagwés. Vers 1270 se constitue la dynastie salomonide, qui se poursuivra sous diverses formes jusqu'à l'empire éthiopien, le Gouvernement militaire provisoire de l'Éthiopie socialiste, la république démocratique populaire d'Éthiopie et l'actuelle république fédérale démocratique d'Éthiopie.

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    On identifie des États indépendants sur des parties du territoire actuel de l'Éthiopie depuis près de 3 000 ans. Vers le VIIIe siècle av. J.-C., on constate la formation du royaume D'mt, suivi de diverses autres entités, sans que les continuités soient toujours claires : le royaume d'Aksoum, les royaumes zagwés. Vers 1270 se constitue la dynastie salomonide, qui se poursuivra sous diverses formes jusqu'à l'empire éthiopien, le Gouvernement militaire provisoire de l'Éthiopie socialiste, la république démocratique populaire d'Éthiopie et l'actuelle république fédérale démocratique d'Éthiopie.

    Préhistoire et Antiquité
     
    Un des vestiges du royaume de D'mt : les ruines du temple de Yeha, dans le Tigré, Éthiopie.

    Considérée comme l'un des berceaux de l'humanité[1], l'Éthiopie est l'une des plus anciennes zones de peuplement humain. Les premières traces d'hominidés remontent à 3 ou 4 millions d'années. L'apparition de l'Homo erectus et de l'Homo sapiens dans la région se situe entre 1,7 million d'années et 200 000 ans avant notre ère. L'Éthiopie, durant l'Antiquité, semble avoir fait partie du pays de Pount (IIIe millénaire av. J.-C. — Ier millénaire av. J.-C.).

     
    Les stèles d'Aksoum avec celle d'Ezana au centre. Patrimoine mondial de l'UNESCO[2].

    Au Ier millénaire av. J.-C., des populations Sabéennes du Yémen s'installèrent sur les hauts plateaux d'Érythrée et d'Éthiopie et y fondèrent plusieurs colonies de peuplement[3],[4]. Les Sabéens y introduisirent leur architecture, leur style artistique, leur religion et leur système d'écriture[3],[4],[5]. Leur présence en Éthiopie et en Érythrée se retrouve dans les nombreuses inscriptions présentes[4],[5].

    Le métissage entre les populations locales et les groupes migrants Sabéens donna naissance à une nouvelle culture dite « pré-aksoumite »[3]. Cette culture se constitua, au Ve siècle av. J.-C., en un état appelé royaume D'mt[3]. Cette période est caractérisée par l'effacement progressif des liens avec l'Arabie du Sud, bien que D'mt conserve les éléments culturels apportés par les Sabéens[4]. L'alphabet sudarabique apporté par ces derniers donna ainsi naissance à l'alphasyllabaire guèze durant cette période[6].

    Après la chute du royaume de D'mt au Ve siècle av. J.-C., divers royaumes ont dominé la région jusqu'à l'émergence, au Ier siècle av. J.-C., du royaume d'Aksoum, premier empire important de l'histoire éthiopienne.

     
    Le royaume d'Aksoum à son apogée.

    Le royaume d'Aksoum constitue un grand État de la Corne de l'Afrique, sa capitale, Aksoum, est une ville cosmopolite où vivent des Juifs, des Grecs et des populations d'Arabie du Sud. Situé au bord de la mer Rouge, le royaume prospère grâce à l'exportation de produits primaires, se développe autour du commerce et commence à contrôler les principales routes maritimes passant par la région[h 1]. L'élément caractéristique d'Aksoum est la pratique de l'écriture[h 1].

    Vers 330, Ezana, négus d'Aksoum, se convertit au christianisme, qui devient la religion officielle[h 2], adoptée par la population locale majoritairement juive et païenne[h 2]. De 2009 à 2016, une équipe d'archéologues européens a mis au jour, dans la région de Yeha, une ancienne cité du royaume d'Aksoum, nommée par eux Beta Samati, occupée de 750 av. J.-C. à 650 apr. J.-C. Une basilique chrétienne du IVe siècle fut trouvée au milieu des ruines[7].

    Vers la fin du VIe siècle, les gouverneurs aksoumites et les garnisons militaires installées en Arabie méridionale sont expulsées par les forces locales avec le soutien des Perses[h 3]. Son déclin se poursuit avec l'expansion de l'Islam vers le milieu du VIIe siècle qui menace l'hégémonie maritime d'Aksoum[h 3]. La destruction par les Arabes du port d'Adulis affecte les revenus de l'État, déstabilise l'autorité du royaume et aggrave les troubles internes[h 3]. Le manque de sécurité rend les routes caravanières impraticables, l'accès à la mer est toujours plus compliqué et les ressources naturelles s'épuisent[h 4]. Tous ces facteurs contribuent à la chute d'Aksoum et au déplacement du pouvoir politique éthiopien vers le sud[h 4].

    Moyen Âge éthiopien Zagwés et instauration des Salomonides
     
    Bete Giyorgis, une des églises rupestres de Lalibela constituant l'héritage le plus célèbre de la dynastie des Zagwés.

    Vers 990, le royaume aksoumite s'effondre définitivement. En raison de la progression de l'Islam depuis les côtes, les chrétiens sont repoussés vers l'intérieur des terres et divers prétendants s'affrontent pour le contrôle du centre du pays[h 5]. Vers 1140[h 5], les Zagwés du Lasta, arrivent au pouvoir. Ils dominent initialement la partie septentrionale de leur province, mais à partir du début du XIIIe siècle, ils étendent leur contrôle sur le Tigré, le Bégemeder et l'actuel Wello[h 6]. La structure féodale de l'Empire offre aux seigneurs régionaux une relative autonomie[h 6]. Le souverain le plus célèbre est Gebre Mesqel Lalibela qui ordonne la construction d'un ensemble d'églises taillées dans la roche[h 6]. Le soutien de l'Église orthodoxe éthiopienne assure aux Zagwés leur suprématie[h 7].

     
    L'Empire éthiopien (Aksum) médiéval avant les invasions d'Ahmed Gragne.

    En 1270, le dernier souverain zagwé, Yetbarek, est renversé par Yekouno Amlak[8]. L'arrivée au pouvoir de ce dernier marque l'instauration de la dynastie salomonide qui perdure symboliquement de façon presque continue jusqu'en 1974[h 8], sans qu'il y ait une continuité familiale. Pendant presque trois siècles, le pays vit une période de développement culturel, administratif, d'extension territoriale et de guerres contre les sultanats musulmans voisins des royaumes chrétiens[h 9], bien que ce clivage recouvre plus les dirigeants que les habitants. Cette phase de l'histoire éthiopienne est parfois surnommée l'« âge d'or de la dynastie salomonide ». Amda Syon Ier mène les premières grandes conquêtes territoriales durant les trente années de son règne (1314-1344)[h 10] ; une expansion consolidée par Dawit Ier et Yeshaq Ier de la fin du XIVe au début du XVe[h 11].

    Outre ses succès militaires, l'Éthiopie connaît une phase de développement du christianisme orthodoxe et de la littérature nationale. Dans ce domaine Zara Yaqob semble être le souverain emblématique. Durant son règne de 1436 à 1468, il convertit les habitants du Damot et du Godjam et participe aux débats théologiques[h 12]. Il est également un auteur, dont l'œuvre la plus connue est le Metsehafe Berhan (Livre de la Lumière)[h 13]. Durant ces siècles, diverses réformes administratives et financières réorganisent l'Empire. Un des éléments caractéristiques de cette période est le déplacement continu de la cour, une pratique à laquelle ont recours la majorité des souverains et qui leur permet de marquer leur domination sur les responsables régionaux, d'assurer leur contrôle du territoire[h 14] et de répartir la prédation qu'ils exercent sur les ressources.

    Guerre, troubles et déstabilisation de l'autorité impériale
     
    Lebne Dengel, un des souverains éthiopiens ayant lutté contre les forces d'Ahmed Ibn Ibrahim Al-Ghazi.

    Cette phase de prospérité s'achève au début du XVIe siècle, sous Lebne Dengel. Les troubles économiques et la forte poussée démographique dans les sultanats islamiques conduisent, en 1527, à l'éclatement d'une guerre entre des forces musulmanes menées par Ahmed Ibn Ibrahim Al-Ghazi, dit Ahmed « Gragne » (gaucher en amharique) et l'empire chrétien éthiopien[h 15]. Soutenues par les Ottomans, les troupes d'Ahmed remportent une série de victoires et en 1535, l'Empire éthiopien semble sur le point de s'effondrer[h 16]. Néanmoins, le cours du conflit va changer à partir de 1541, avec l'arrivée des Portugais auxquels Lebne Dengel a fait appel. Le 21 février 1543, à l'issue de la bataille de Wayna Daga, Ahmed est tué et son armée défaite, laissant derrière lui un pays en ruine et fragilisé[h 17].

    Face à la faiblesse de l'Empire, les Oromos vont migrer du Balé et du Sidamo, vers le nord, le centre et l'ouest de l'Éthiopie ; ces mouvements de population vont durer trois décennies de 1550 à 1580[h 17]. Des jésuites, comme Balthazar Telles, arrivent. Au cours de la seconde moitié du XVIe siècle, ceux-ci parviennent à imposer le catholicisme au souverain Sousnéyos qui se convertit en 1621[h 18]. Les protestations s'ensuivant se transforment en une véritable guerre civile et Sousnéyos abdique le 14 juin 1632, en faveur de son fils Fasilides[h 19]. C'est ainsi que se concluait dans le sang une intéressante parenthèse de tentative d'occidentalisation d'un pays africain, généralement méconnue par rapport aux entreprises menées et réussies par la Compagnie de Jésus en Amérique latine ou en Chine. Près d'un siècle de présence européenne (Espagnols, Portugais et Italiens essentiellement) qui a influencé cette Nation qui faisait rêver l'Occident ne serait-ce qu'au regard de la légende du Prêtre Jean.

     
    Le palais de Fasilides à Gondar.

    En 1632, le nouveau souverain fonde Gondar où il fait construire un château[h 20]. La nouvelle ville devient la capitale du pays ainsi qu'un important centre religieux et commercial. L'année 1632 marque le début de la période gonderienne qui prend fin en 1769 et pendant laquelle les divisions doctrinales de l'Église, la percée de l'islam et la lutte contre les offensives oromos conduisent vers un effondrement annoncé[h 20]. Au cours de la première moitié du XVIIIe siècle, la stagnation économique et la déstabilisation de l'autorité impériale poussent les seigneurs locaux à prendre toujours plus de pouvoirs[h 20].

    En janvier 1769, avec le meurtre de Yoas Ier débute le Zemene Mesafent (« l'Ère des Princes »)[h 21]. Jusqu'en 1855, une série de souverains aux pouvoirs limités règnent à Gonder[h 22] ; les véritables détenteurs du pouvoir sont les maires de palais et les seigneurs locaux. Le Zemene Mesafent constitue une phase de stagnation économique, les innovations étant dissuadées par les guerres incessantes[h 23]. La population éthiopienne a particulièrement souffert durant cette période et au cours des années 1830, une ancienne prophétie ressurgit selon laquelle un souverain arrivera au pouvoir, instaurera un règne juste et assurera la paix au pays[h 24]. Vers le milieu du XIXe siècle, les exploits militaires d'un jeune Kassa Hailou semblent annoncer l'avènement de ce monarque tant attendu.

    Centralisation et indépendance : la construction de l'État éthiopien moderne Face aux menaces étrangères
     
    Menelik II à la bataille d'Adoua, une victoire assurant à l'Éthiopie le maintien de son indépendance.
     
    La bataille de Gallabat, la bataille de Gundet et la bataille de Gura sont quelques-unes des batailles pour la défense de l'Éthiopie où l'empereur Yohannes IV a conduit les troupes éthiopiennes.
     
    En plein partage de la corne de l'Afrique, l'Éthiopie reconstitue un Empire afin de résister, avec succès, à l'assaut colonial.
    Empire d'Éthiopie avant les conquêtes de Menelik II (1875) Empire d'Éthiopie après les conquêtes

    De 1855 au début du XXe siècle, trois souverains importants se succèdent. Le premier est Téwodros II dont le couronnement en 1855 marque la fin du Zemene Mesafent et le début de l'histoire moderne du pays[h 25]. Premier véritable modernisateur, il lance un processus d'expansion, d'unification et de centralisation. Néanmoins, les résistances des notables régionaux devant les mesures adoptées et un conflit avec la Grande-Bretagne conduisent à son suicide en 1868 à Maqdala[h 26]. Après le bref règne de Tekle Giyorgis II (de 1868 à 1871), Kassa Mercha arrive au pouvoir en janvier 1872 sous le nom de Yohannes IV. Moins centralisateur que Téwodros II, il assure néanmoins la suprématie du negusse negest et fait progresser la construction nationale.

    Toutefois, après l'ouverture du canal de Suez, les agressions étrangères le détournent des questions de politique interne. De 1875 à 1889, il défend les frontières éthiopiennes contre trois pays. Tout d'abord les Égyptiens, auxquels il inflige une lourde défaite en 1875-1876. Ensuite, les Italiens, installés à Metsewa depuis 1885, sont vaincus à la bataille de Dogali en 1887 par le ras Alula Engeda. Enfin, en partie à la suite d'un accord avec la Grande-Bretagne, Yohannes affronte les mahdistes soudanais. Il meurt de ses blessures le 10 mars 1889, au lendemain de la bataille de Metemma.

    La même année, le négus du Choa est proclamé negusse negest sous le nom de Menelik II. Le troisième grand souverain de cette fin de siècle poursuit le processus d'expansion, d'unification et de modernisation du pays, tout en affrontant les menaces européennes. Il signe avec l'Italie le traité de Wouchalé, censé assurer la paix et l'amitié entre les deux pays. Cependant, les Éthiopiens refusent de reconnaître l'interprétation du texte par les Italiens (qui l'utilisent pour notifier un protectorat selon la procédure définie à Berlin) et le dénoncent en 1893. Ce conflit débouche sur une guerre en 1895, qui s'achève par la bataille d'Adoua au cours de laquelle plus de 100 000 Éthiopiens écrasent les forces italiennes en mars 1896[9]. Ce succès garantit à l'Empire son indépendance et la reconnaissance internationale de la souveraineté éthiopienne, même si certains auteurs évoquent alors une « semi-souveraineté »[h 27].

    L'Éthiopie connaît une famine particulièrement meurtrière entre 1889 et 1891, tuant environ un tiers de ses habitants[10].

    Du début du XXe siècle à la chute de l'Empire
     
    Le Negusse Negest Haïlé Sélassié Ier en 1934.

    Au début du XXe siècle, durant les années 1910-1920, deux souverains aux personnalités bien différentes vont se succéder : Ledj Eyassou et Zewditou Ire. Le premier est officiellement au pouvoir de 1913 à 1916, son bref règne est particulièrement agité[h 28]. Son désintérêt pour les affaires publiques, sa proximité avec les milieux musulmans et sa politique antagoniste avec les puissances européennes voisines poussent la noblesse éthiopienne à le renverser lors du coup d'État du 27 septembre 1916[h 29]. Zewditou Ire arrive sur le trône impérial, son règne voit l'émergence de Tafari Makonnen, nommé régent et prince lors du coup d'État[h 30]. Au cours des années 1920, les progressistes et les conservateurs s'opposent à la Cour[h 31]. Les seconds s'opposent aux volontés d'ouverture sur le monde que défendent les premiers. En 1923, en faisant de l'Éthiopie le premier pays africain adhérant à la Société des Nations, Tafari remporte une victoire[h 31].

    Durant les années 1920, il conduit des politiques de modernisation dans tous les domaines, aussi bien sociaux, avec l'abolition de l'esclavage, qu'économiques et juridiques[h 31]. Ce processus se poursuit sous son règne débuté le 3 avril 1930, à la suite du décès de Zewditou ; Tafari est couronné le 2 novembre 1930 sous le nom de Haïlé Sélassié Ier. Une nouvelle constitution, la première de l'histoire éthiopienne, est promulguée en 1931, de nombreuses écoles sont construites, l'économie est réformée et le pouvoir politique centralisé ; tout est entrepris pour mettre l'Éthiopie à l'abri d'une invasion coloniale[h 32]. Cela n'empêche pas le déclenchement d'une guerre avec l'Italie fasciste en 1935 qui débouche sur une défaite éthiopienne et le début d'une occupation partielle du pays pendant cinq ans durant lesquels une résistance nationale s'organise[h 33]. En 1941, année de la libération, s'ouvre une nouvelle période nommée Addis Zemen (en français : Nouvelle Ère) à la suite de la défaite italienne devant les forces anglo-françaises au nord du pays, les Italiens qui occupaient Addis-Abeba ayant capitulé et la Force publique du Congo belge, attaquant au sud, ayant reçu la capitulation italienne d'Asosa. Dès lors, il s'agit pour Haïlé Sélassié de reprendre les chantiers ouverts en début de son règne. Le pays connaît alors une période d'industrialisation et de croissance économique, mais également divers troubles[h 34], notamment de la part de troupes restantes italiennes qui y mènent une guérilla[11]. De plus, des rébellions éclatent dans le Tigré en 1943, ainsi que dans le Godjam, le Balé, l'Ogaden et en Érythrée durant les années 1960[h 35]. À ces mouvements, viennent s'ajouter des manifestations contre le pouvoir politique ainsi que des grèves. Dans le contexte de la guerre froide, alors que la politique du Négus est plutôt favorable à l'occident, le bloc est européen soutient le mouvement de contestation, pris en main par un comité de militaires appelé Derg qui parvient en septembre 1974 à destituer Haïlé Sélassié Ier et à renverser la plus vieille monarchie du monde[h 36].

    De 1974 à nos jours Révolution et régime du Derg
     
    Mengistu Haile Mariam, adhérent du Derg, dirige le pays de 1977 à 1991. Il a été condamné à mort pour génocide et des crimes commis pendant son régime.
     
    Musée mémorial des martyrs de la Terreur rouge, Addis-Abeba.

    Le 12 septembre 1974, Haïlé Sélassié est déposé et arrêté, les anciens dignitaires sont emprisonnés, les grèves et manifestations sont interdites[p 1]. Le Derg, la junte militaire, commence à s'installer au pouvoir. Les étudiants sont envoyés dans les provinces afin de mener des campagnes d'alphabétisation et diffuser la nouvelle idéologie, d'inspiration soviétique[p 1]. Mais beaucoup y sont victimes des maladies et des bandes armées par les propriétaires terriens, hostiles au nouveau régime. Néanmoins, le taux d'alphabétisation passe de 5 % en 1974 à 35 % en 1981, ce qui a valu à l’Éthiopie la reconnaissance de l'UNESCO qui lui a décerné son prix en 1980[12].

    L'État prend le contrôle partiel de l'économie, plusieurs entreprises sont nationalisées. En 1975, une réforme agraire est lancée. Les terres sont nationalisées, des coopératives de paysans sont mises sur pied, des terres sont distribuées à ceux qui n’en avaient pas avec une limite de taille par exploitation[12]. Le Derg promet de faire de l’Éthiopie un État plurinational : « plus aucune nationalité ne dominera les autres ». Elle met en place un Institut des nationalités qui regroupait des géographes, des ethnologues, des économistes afin de mieux appréhender les caractéristiques de chaque ethnie. Les musulmans sont admis comme de véritables Éthiopiens pour la première fois dans l'histoire du pays et trois jours de fêtes musulmanes sont reconnus par l’État[12]. Enfin, un grand parti unique est mis en place sur une base nationale et socialiste[p 2]. Si le Derg arrive initialement à affirmer son autorité, les partis politiques civils réclament un transfert du pouvoir et le retour des militaires dans les casernes. Les deux principaux partis d'opposition sont le Meison[Note 1] et le Parti révolutionnaire du peuple éthiopien (PRPE). Les affrontements entre le deuxième parti et le régime vont dégénérer et de la fin 1976 à la fin 1978, le pays vit « deux années terribles[p 3] ». Les confrontations sont particulièrement brutales et la répression accentue le radicalisme du régime. Les familles des membres du PRPE sont visées et la participation de jeunes écoliers aux côtés du PRPE conduit le Derg à massacrer des classes entières[p 3] du 29 avril au 1er mai 1977, près d'un millier d'étudiants et lycéens sont assassinés après des mobilisations étudiantes contre le régime[p 3],[13]. Cette période de violence politique, surnommée Terreur rouge, a marqué les Éthiopiens, les rapprochant ainsi des autres peuples du bloc communiste. Les meurtres sont également courants au sein du Derg, où les rivalités entre personnes donnent lieu à des arrestations et à des fusillades[p 2]. C'est finalement le lieutenant-colonel Mengistu Haile Mariam qui émerge au sein de la junte et qui dirige le pays à partir de 1977.

    Cette même année 1977, le pays fait face à une offensive de l'armée somalienne qui envahit le territoire national en juillet. La guerre de l'Ogaden est déclenchée ; avec le soutien des pays communistes européens et de Cuba, l'Éthiopie remporte le conflit[p 3]. Durant la guerre civile, les violences du régime touchent durement les civils et favorisent les séparatistes du Tigré et de l'Érythrée qui progressent : dans le nord du pays, le régime rencontre de réelles difficultés militaires. Alors que l'URSS, en pleines perestroïka et glasnost, n'est plus en mesure de soutenir le régime, la fin du Derg semble se rapprocher lorsque les deux principaux mouvements de guérilla, le Front de libération du peuple du Tigré (FLPT) et le Front populaire de libération de l'Érythrée (FPLE) coordonnent leurs opérations à partir du milieu des années 1980[h 37]. En 1984-1985, la Grande Famine tue un million d'Ethiopiens sur 57. L'aide internationale donne naissance au "charity business" (USA for Africa), mais est difficilement acheminée. Une série de victoires conduit le premier mouvement à élargir ses objectifs au sein de la coalition du Front démocratique révolutionnaire du peuple éthiopien (FDRPE), censé libérer tout le pays. Le 21 mai 1991, Mengistu Haile Mariam décide de fuir le pays et une semaine plus tard, les forces du FDRPE pénètrent dans la capitale. Le 28 mai 1991, le régime du Derg est tombé[h 38] et la date est devenue un jour de fête nationale.

    Constitution de 1994 et évolution ultérieure
     
    Meles Zenawi, Premier ministre d'Éthiopie jusqu'en août 2012.

    De 1991 jusqu'en 1995, le pays est dirigé par un gouvernement de transition chargé de mener l'Éthiopie vers un régime démocratique. En 1992, le Front démocratique révolutionnaire du peuple éthiopien (FDRPE) remporte les premières élections multipartites de l'histoire du pays et prépare une nouvelle Constitution. L'année suivante, le référendum pour l'indépendance de l'Érythrée, effectué en accord avec le FDRPE, voit la victoire des séparatistes. En 1994, l'assemblée constituante vote la ratification de la nouvelle Constitution qui entre en vigueur en août 1995. La république fédérale démocratique d'Éthiopie est officiellement proclamée. La transition s'est effectuée rapidement et dans une atmosphère relativement calme.

    Le FDRPE va néanmoins faire face à quelques difficultés. En 1998, l'Érythrée envahit l'Éthiopie et déclenche une guerre qui va durer deux ans. Le conflit fait plus de 80 000 morts et voit la victoire des troupes éthiopiennes. Depuis les rapports restent difficiles entre les deux États. Le gouvernement central est également confronté à deux rébellions armées, le Front de libération oromo (FLO) et le Front national de libération de l'Ogaden (FNLO). Ce dernier est d'ailleurs soutenu par l'Union des tribunaux islamiques, un mouvement actif en Somalie où l'Éthiopie est intervenue, en soutien au gouvernement officiel de Mogadiscio, de 2006 à 2009. Malgré la constitution, le pays est considéré[Par qui ?] dans les faits[Lesquels ?] comme un état policier liberticide.

    En 2005, les élections générales voient la montée des partis politiques de l'opposition qui ont remporté de nombreux sièges au parlement national et aux conseils régionaux. Ceux-ci contestent toutefois ces résultats qui permettent au FDRPE de se maintenir au pouvoir. Des manifestations violentes éclatent à Addis-Abeba et plusieurs opposants sont arrêtés. Si les élections générales de 2010 suscitent une même passion avec un taux de participation de 90 %[14], les résultats ne confirment pas la tendance de 2005. Au contraire, le FDRPE et ses alliés remportent la quasi-totalité des sièges de la chambre basse tandis que l'opposition ne s'impose que dans deux circonscriptions[15]. Cette écrasante victoire à 99 %[16], contestée par les opposants, renforce la présence du parti de Meles Zenawi dans toute l'Éthiopie. Enfin, ces élections se distinguent des précédentes par le calme et le climat serein dans lequel le processus se déroule. En 2011, une crise alimentaire touche une grande partie de la Corne de l'Afrique. Dans la nuit du 20 au 21 août 2012, Meles Zenawi décède en pleine fonction après 21 ans au pouvoir. Conformément à la Constitution (article 73), Haile Mariam Dessalegn est désigné comme Premier ministre par la Chambre des représentants des peuples. Les Oromos, ethnie majoritaire avec plus du tiers de la population, entrent en rébellion en novembre 2015. Les Amharas, un quart de la population, font de même en août 2016. L'état d'urgence est décrété le 9 octobre 2016. Haile Mariam Dessalegn démissionne en février 2018 à la surprise générale[17]. Le 2 avril 2018, Abiy Ahmed lui succède[18]. Cet homme politique de longue date est populaire parmi les Oromos dont il est issu. Dès son discours d’investiture, il tend la main à l’Érythrée, en appelant à mettre fin à un conflit qui dure depuis l’indépendance du pays, en 1993. Il qualifie également les partis d’opposition de frères et non d’ennemis[19]. La situation intérieure et les relations avec les pays voisins s'apaisent[20],[21],[22].

    Cependant, les relations entre le gouvernement fédéral et celui de la région du Tigré se dégradent rapidement après les élections[23]. Le 4 novembre 2020, le Front de libération du peuple du Tigré (FLPT) lance une attaque contre des bases des Forces de défense nationale éthiopiennes à Mekele, la capitale du Tigré, et à Dansha, une ville de l’ouest de la région. La guerre du Tigré escalade et se poursuit depuis cette date[24].

    Conflit de 2020-2021
     
    Situation du conflit.

    Les Forces de défense tigréennes ont repris la capitale régionale, Mekele, forçant le gouvernement éthiopien à décréter, le lundi 28 juin 2021, un « cessez-le-feu unilatéral »[25].

    Le 28 juin 2021, sept mois après avoir dû abandonner Mekele face aux assauts de l’armée gouvernementale éthiopienne, les forces du Front de libération du peuple du Tigré (FLPT) reprennent le contrôle de la capitale provinciale du Tigré. Dans cette région du nord de l’Éthiopie, en guerre depuis novembre 2020[26], les derniers jours ont été le théâtre d’un spectaculaire renversement de situation militaire, forçant le gouvernement éthiopien à décréter un cessez-le-feu[27],[28].

    En marge du conflit au Tigré éthiopien, l’armée soudanaise tente de reprendre la main sur le triangle d’Al-Fashaga, un territoire agricole disputé par L’Éthiopie et le Soudan, pays de la Corne de l'Afrique[29]. C’est un bras de fer qui menace de dégénérer, dans le sillage du conflit en cours dans la province éthiopienne du Tigré. En jeu : le triangle d’Al-Fashaga[30], soit 250 km2 de terres fertiles coincées entre les rivières Tekezé et Atbara, au cœur d’une dispute historique entre le Soudan et l’Éthiopie[31].

    Début novembre 2021, plusieurs États occidentaux ordonnent à leurs nationaux de quitter l'Éthiopie, en prévision d'une éventuelle prise d'Addis-Abeba par le TPLF accompagnée d'exactions tribales. À ce stade le conflit a coûté, outre des milliers de morts, le déplacement forcé de plus de deux millions de personnes et un risque de famine pour cinq millions[32].

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